COMMENT SE METTRE EN MODE « TOURISME » PEUT RéGéNéRER LE CERVEAU

Lorsqu’on découvre une région, un site ou une ville en touriste, plusieurs éléments œuvrent pour le bonheur de notre cerveau. Heureusement, on peut activer les mêmes leviers simplement en intégrant régulièrement quelques changements au cœur de notre routine.

Le touriste n’aime pas toujours être considéré comme tel. Malgré notre désir de contourner les figures imposées du genre, difficile cependant d’échapper à la classification. Que l’on parte s’isoler dans une montagne balkane, camper dans les déserts, séjourner dans une ferme biodynamique ou pratiquer le yoga en Inde, on pourra éventuellement se vanter d’être un précurseur de tendance, pas d’être autre chose qu’un touriste. Et tant mieux, car le cerveau se régénère dans l’exercice, qui recoupe tout ce dont nos neurones ont besoin pour se revigorer. Et nul besoin de parcourir des milliers de kilomètres, l’effet opère même en circuit court, dès lors que la découverte et le mouvement sont au programme. 

Réactiver le circuit de la motivation

Nos habitudes nous structurent et nous donnent des repères pour mener des projets à long terme. Mais la répétition a besoin d’être rompue pour relancer l’élan vital qui finit par s’épuiser dans la routine. À la longue, notre taux de cortisol (l’hormone du stress) augmente et ne génère plus d’énergie. On tient « sur les nerfs » : tout nous irrite, rien ne nous stimule. Il est temps d’organiser un changement d’air. Planifier et préparer une échappée réactive instantanément le circuit de la motivation. Notre cerveau libère de la sérotonine, « l’hormone du bonheur », et nous sommes ranimés rien qu’à l’idée du départ et de son organisation.

Réveiller notre curiosité

Cet effet se renforce par le biais de l’imagination. Découvrir une destination en avant-première avec la littérature (un guide, un roman) ou un film qui s’y déroulent nous imprègne de son ambiance et nous procure du plaisir. Une fois sur place, les réminiscences prépareront d’autant mieux le terrain à des souvenirs durables. C’est l’effet de la dopamine, neurotransmetteur qui consolide le système de la mémoire. Par ailleurs, certaines lectures sont souvent à l’origine d’un tourisme de pèlerinage : marcher sur les pas de Rimbaud à Charleville ou de Proust et de Flaubert en Normandie, chercher l’ombre de Van Gogh dans le soleil des Alpilles, déambuler dans Paris guidé par l’esprit de Baudelaire… La culture a les propriétés du voyage et nous permet de penser en arborescence, ce dont raffole notre cerveau. Même des lieux blafards peuvent être auréolés par le génie du lieu : par exemple, Romain Gary à Vilnius (thème d’un roman de François Henri Désérable(1)), ou la tombe d’une idole dont l’œuvre et la biographie nous ont transportés.

Enrichir notre environnement mental et sensoriel

Notre cerveau a soif de changement et de découvertes. De nouvelles expériences sont au programme de tout dépaysement. Les surprises sensorielles et intellectuelles (climat, nourriture, langue ou accent, odeurs, paysages, architecture, art, artisanat, mœurs…) stimulent des connexions cérébrales inactives ou étiolées par la répétition de notre emploi du temps. La nouveauté entraîne la production de neurones à partir des cellules souches, notre cerveau se régénère. Alors que l’on est souvent blasé dans notre environnement familier, un sentiment d’euphorie nous gagne. Cet effet anti-déprime renforce notre système immunitaire. L’esprit de découverte, quelle que soit cette dernière, permet de conserver un cerveau vigoureux.

Favoriser le mouvement

Un emploi du temps répétitif nous ramollit le corps et l’esprit. Les villes culturellement riches et largement piétonnes sont un bon antidote à la paresse conjoncturelle et à la sédentarité. Elles nous transforment en marcheurs infatigables, avalant des kilomètres pour assouvir notre curiosité sollicitée à chaque coin de rue. Dans l’effort, les muscles produisent des substances qui ont un effet direct sur la mémoire et les capacités cognitives. 

Rééquilibrer notre biorythme

Un bon voyage nous donne envie de nous lever et de nous coucher tôt (pour en profiter pleinement et bien récupérer pour la suite). On rééquilibre ainsi notre biorythme. L’activité journalière suivie d’un sommeil réparateur entretient la santé de nos méninges. Pendant le repos, le cerveau fait le ménage. En se nettoyant, il enregistre mieux ce qu’il a appris dans la journée. Avoir sa dose de plaisir « intelligent » par jour (qui réveille d’autres connexions et fait des liens entre toutes), nous donne le sentiment d’un accomplissement. On va au lit sans regret et sans frustration… Idéal pour bien dormir.

Profiter du moment présent

La démarche touristique est motivée par le plaisir d’en profiter pleinement, de faire corps avec l’environnement. Que ce soit dans la nature, à la mer ou en ville, on entend bien se changer radicalement les idées. Ouvert aux nouveaux stimuli, on se concentre sur l’instant présent. Nous perdons un peu de nos automatismes cognitifs, nos pensées obsédantes et nos préoccupations sont mises entre parenthèses. On coupe spontanément avec les sources d’anxiété (comme le bombardement d’infos via nos smartphones). Nous nous trouvons en situation de méditation à ciel ouvert, d’autant plus puissante qu’elle est rythmée par l’action. Cet état, étudié maintes fois, est le plus favorable à la neuroplasticité du cerveau qui permet d’améliorer la santé mentale et physique.

(1)Un certain M. Piekielny, François-Henri Désérable, éd. Gallimard

Pour en savoir plus sur les besoins de notre cerveau, voir les travaux du Professeur Pierre-Marie Lledo (Institut Pasteur) etdu Dr Hamilton (Département de psychologie, professeur adjoint à l'Institut des neurosciences et de la santé mentale à l’Université de l'Alberta).

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